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> frontière salle d'attente
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>> Ébauche de termes ou de concepts issus de l´observation sur le terrain, les mots qui constituent ce bref lexique ont pour objectif de relier de manière thématique les 237 lieux analysés, de proposer un regard transversal complétant la forme linéaire du parcours „fiche par fiche“. Pistes de réflexions, sorte de trame thématique, cet ensemble de termes évoluera et s´enrichira avec le temps et les collaborations que nous tachons de mettre en place.
[ si vous souhaitez participer à ce travail d´approfondissement contactez nous : contact@atelier-limo.eu

 

Les espaces frontaliers sont sans cesse tributaires de décisions prises à une échelle supérieure : par la région, l’Etat ou l’Europe. Ces décisions peuvent considérablement changer le paysage, le fonctionnement de ces espaces. Il peut être ainsi décidé, sans concertation avec les acteurs concernés, du statut de la frontière, de la légitimité ou non de la présence d’une partie de la population ou encore de l’ouverture ou de la fermeture d’un poste de frontière. Le tracé de la frontière peut même parfois revêtir un caractère provisoire : officiellement comme ce fut le cas de la " french line " séparant l’Italie de la Slovénie qui subit des modifications entre 1945 et 1975 ou dans les mentalités comme la ligne de démarcation entre l’Allemagne et la Pologne qui a longtemps été et est parfois aujourd’hui encore contestée par une partie de la population car considérée comme non légitime et donc susceptible d’évoluer.

Cette dépendance des autorités locales vis-à-vis des décisions de l’Etat ou de l’Europe tout comme le manque de clarté en ce qui concerne le statut de la frontière elle-même laisse ainsi les frontaliers dans l’état d’attente perpétuelle. Comme une allégorie, les deux ponts de Forst (D-PL 25), figés dans le temps, dans l’attente de se rejoindre un jour ou d’être définitivement détruits , incarnent de manière poignante la complexité de ce phénomène que nous appelons " frontière salle d’attente ".

Les manifestations de ce sentiment d’attente ne sont pas localisées : ainsi, certains réfugiés des Sudètes se demandaient ou se demandent encore s’ils pourront un jour retourner sur les lieux de leur enfance et " récupérer " leurs biens (CZ-D), le travailleur hongrois s’il pourra bientôt se rendre librement sur son lieu de travail sans être dépendant des services de transport mis à disposition par l’entreprise autrichienne qui l’embauche (A-H 04), le Slovaque de Zahorska Ves (SK-A 03) espère bientôt être certain de pouvoir se rendre en Autriche indépendamment des crues de la rivière et l’habitant des environs de Nova Gorica s’est sans doute demandé durant 30 années quand il pourra enfin se recueillir sur la tombe de son proche restée dans la partie italienne du cimetière de Miren (I-SLO 26).

On pourrait quasiment étendre cette liste au nombre de postes étudiés. Chaque lieu frontalier exprime à sa manière ce sentiment d’attente. Ces espaces sont sans cesse en devenir, s’inscrivent dans une sorte de processus dont les paramètres qui les définissent peuvent varier d’un moment à l’autre suite à une décision politique. Parfois, ce phénomène semble constituer un frein à la sédentarisation: les zones frontalières sont dans la majeure partie des cas des régions où la population est fortement décroissante. En témoignent les villes frontalières allemandes rétrécissantes appelées " schrumpfende Städte " pour lesquelles la position frontalière a vraisemblablement constitué en plus de la chute du communisme un handicap pour leur développement.

Aujourd’hui, l’entrée prochaine des nouveaux pays membres dans l’espace de Schengen qui provoquera sûrement de nouveaux changements aussi bien spatialement que dans l’usage de ces espaces frontaliers entretient ce phénomène.

[ D-PL 01D-PL 25, D-PL 34, CZ-D 12, SK-A 04, A-H 04, A-H 14, I-SLO 26 ]